Sombre journée

Ky choisit l'une des tables, près de la porte, et s'installa tranquillement, levant la main pour attirer le serveur. Celui-ci lui jeta un regard étrange, il n'avait pas l'habitude de le voir ainsi, si sobre, et surtout en compagnie d'une autre personne que le démon qui lui faisait office d'ami. Ky sourit à Naur, en face de lui, et dit :

"-J'adore venir ici. Je déjeunais très souvent avec..."

Il s'arrêta, et secoua la tête. Pourquoi penser à lui ?

"-Enfin, reprit-il, c'est très bon, simple mais délicieux.Tu n'es jamais venu ?"

Naur regarda Ky tristement. Décidement, sa dispute avec Natchin l'avait beaucoup affecté.

- Je ne suis venu ici qu'une seule fois, mais je n'ai pas vraiment eu le temps de goûter la cuisine car Sûl est venu vers moi blessé..." il passa commande au serveur puis ajouta " Que désire-tu? Je t'offre ce repas." il déclara cela d'un ton qui n'admettait aucune contradiction de la part de son ami.

Ky sourit pour accepter la gentille proposition de Naur, et attrapa le menu, pour passer commande. Il choisit des mets simples et légers, à dire vrai, il n'avait plus très faim. Il joua un moment avec une petite fleur, posée sur la nappe, et reprit, alors qu'on apportait les plats :

"-Tu sais, ça peut paraître bête, mais après ce qu'il s'est passé, je n'ai plus très envie de rester à Asiya... Je sais que c'est lâchr, mais je n'ai plus la force."

Naur regarda Ky, puis soupira tristement.

- Tu sais, ça ne sert à rien de s'enfuir face à ses problèmes car ils reviennent toujours... Il faut y faire face. Je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire mais il faut persévérer. Et puis, ne crois-tu pas que tu rendras beaucoup de monde triste en partant d'Asiya? Que vont faire les oiseaux sans toi? Que fera ton ami, Natchin, sans toi? Car il tient à toi, sinon il n'aurait pas réagit comme cela. Crois-tu qu'ils t'oublierons? Crois-tu que quelqu'un pourra te remplacer dans leur coeur?" il regarda Ky attendant une réponse.

Voyant que son ami ne réagissait pas, il reprit:

- Combien de coeurs vas-tu briser en partant d'ici? On n'oublie jamais quelqu'un qu'on a aimé, encore plus si on le désire de toutes ses forces." il sourit faiblement " Je sais que je peux paraître très moralisateur comme ça - c'est ma nature de professeur qui ressort - mais je le pense vraiment. De toute façon, il ya un hiboux qui a besoin de soin à l'école, et moi, à qui vais-je parler si mon ami déserte la ville?

Ky soupira et cacha ses yaux un instant derrière ses mains ,pour essuyer les larmes qui perlaient au coin de ses paupières. Il renifla, poussant la nourriture de sa fourchette et murmura :

"-Tu as sans doute raison... C'est pluys facile de fuir, mais c'est que je j'ai toujours fait. Chez moi, dans mon village, et même ce jour là... où... Enfin, peu importe. C'est vrai que ça me ferait de la peine de partir... De quitter ce que j'ai, mes oiseaux, et puis toi... Je t'aime bien, tu es gentil, avec moi... Tu ne m'as pas jugé... Mais c'est dur de le voir se détourner de moi. Je me suis excusé, mais il ne m'a pas regardé et il est parti. Je me serais mis à genoux devant lui, je me serais offert à lui que ça n'aurait rien changé. J'ai entendu qu'on lui donnait un assistant, en venant ce matin... Il saura certainement trouvé du réconfort près de lui... Même si ça me tuera de le voir avec quelqu'un d'autre..."

Ky s'arrêta enfin pour respirer, et la vue brouillée de pleurs, il but son verre d'eau à petites gorgées désordonnées.

Naur sortit un mouchoir qu'il tendit à Ky.

- Il t'en veux car il a crut que tu tenais plus à moi qu'à lui. C'est une réaction puerile, en bref, il te boude. Tu l'a blessé, certes sans le vouloir, alors il veux te le faire payer. Mais à mon avis, tu souffre autant voir plus que lui. Evite de penser à ce qu'il pourrait faire avec son assistant, car cela est sans importance. C'est toi qu'il aime et pas lui. C'est vrai que tu ne mérite pas ce traitement - personne ne le mérite vraiment - mais il faut que tu sois fort. Garde la tête haute lorsqu'il apparait devant toi et essaye, même si c'est difficile de ne pas paraître blessé par son indifférence. Parle lui de choses anodines quand il sera plus disposé, car il vaut mieux éviter de retourner le couteau dans la plaie. Et tout s'arrengera, tu verras! " il sourit au semi-elfe puis reprit "Maintenant mange! Sais tu que chaque repas est très important? Chacun doit faire un tiers de la nourriture que tu ingurgite chaque jours. De plus, tu risque d'avoir des malaises car tu n'aura pas assez de forces pour la journée qui risque, qui plus est, d'être très chaude.

Tout en disant cela, il mangea un petit peu pour "montrer l'exemple", même si, lui aussi, n'avait plus très faim.

Il sourit malgré tout, à travers ses larmes, et avala un peu de nourriture, avant de murmurer :

"-je sais que tu as raison, mais c'est difficile pour moi... Il a toujours été là près de moi depuis que je suis à Asiya. Et sans lui, j'ai l'impression d'être seul. heureusement que tu es là, sinon, je ne sais pas ce que je ferais. Je n'arriverai jamais à ne pas penser à ce qu'il ferait avec son nouvel ami... C'est plus fort que lui... Si ça se trouve, il pourrait très bien me remplacer... Tu dois penser que je ne le tiens pas en estime... Pourtant si... Simplement, je le connais, mon Natchin. Si je peux le garder comme en ami, je m'estimerai heureux, et me tairai et resterai dans l'ombre s'il peut être content ailleurs. Le pire, ça sera de le voir sans lui parler, quand je le croiserai. PArce que je serais obligé de le croiser, les graines pour mes oiseaux sont gardés dans la cuisine... J'irai en espérant ne pas le trouver... Je suis vraiment pathétique, à me plaindre comme ça. En plus, je dois t'ennuyer, avec mes histoires stupides, de gamin capricieux."

Ky osa un sourire timide, et machonna un petit bout de pain. Ca faisait du bien de parler...

Naur soupira. Décidement, tout allait mal en ce moment: à commencer par l'histoire avec le rouquin hier, puis par la visite d'un gard'e de la ville car sa voisine c'était plainte du bruit fait le soir, et enfin la dépression de Ky...
Il se mordit légèrement la lèvre, puis déclara:

- Ne t'inquiète pas, tout va s'arranger! Je te le dis et te le repète : Natchin t'aime! Il te fera la tête peut-être pendant une semaine, mais pas plus. Et non, tu ne m'embête pas avec tes histoires! Tu es mon ami alors je ne veux pas te laisser dans cet état! Et même, je suis professeur et une des premières fonctions de mon métier est de rester à l'écoute des autres!" il soupira à nouveau puis continua "Alors, si je peux faire quelque chose pour toi, n'importe quoi - dans la limite du possible - , dis-le moi.

Il regarda Ky, puis reporta son attention sur l'horloge du restaurant. Il ne lui restait plus beaucoup de temps mais il n'allait pas laisser le semi-elfe comme ça.

Ky termina son déjeuner, se forçant à avaler chaque bouchée, même si sa gorge se contractait pour les refuser. Il but de l'eau pour se calmer, et voulut retrouver le sourire, mais le rictus qui l'offrit devait être bien loin de ces sourires habituels. Rien n'était beauté éternelle, qui ne puisse durer. Il en était la preuve, après sa déchéance. Il voulait que Natchin l'aime mais comme pouvait-il encore le faire après ce qu'il lui avait fait subir. Il avait humilié son ami, l'être qu'il avait de plus cher au monde. Il ne méritait que ça, au diable lui-même si Natchin pouvait être mieux sans lui. Il ferait avec.

Il hocha la tête, et répondit :

"-Merci... Je m'en rappelerai. Je pense que bientôt, tu vas devoir aller travailler et moi aussi, ça me channgera les idées. Si tu as du temps, dans la semaine, tu pourrais passer me voir à la volière. Tu n'es jamais venu, je crois ?"

Question rhétorique. Ky laissa Naur payer un peu à contre coeur, et ils sortirent tous deux, se saluant sur le pas de la porte. Ky voulut se donner une allure et une démarche plus légère, mais ses pas étaient comme des roches, inébranlables. Il attendit d'être retourné à la volière pour oublier ce que venait de lui dire Naur, et fondre en larmes. Tout seul, 'il n'y arriverait pas...

Naur le regarda partir tout en en répondant à l'affirmative au fait qu'il viendrait à la volière.

*Bon, il faut que j'y aille sinon je vais finir par être en retard... Je passerais le voir demain*

Il prit la diréction de l'école, non sans se demander comment il allait faire pour sortir son ami de cette impasse. Il faudrait alors redoubler d'originalité...